La rédaction, la mal-aimée des refontes Web

Voici une histoire qui n’a rien d’imaginaire

Après avoir défendu un budget pendant plus d’un an auprès de son patron, ça y est : le contrat est signé. Le client a choisi son partenaire pour réaliser sa refonte Web. Enfin ! C’est le début d’une aventure nouvelle et porteuse d’espoir.

L’enthousiasme est à son paroxysme. D’un côté, le client est excité à l’idée d’avoir enfin un site Web qui le rendra fier. De l’autre, la firme Web croit qu’il s’agit du mandat idéal pour faire honneur à son talent et sa vision.

Le projet démarre. Les deux parties révisent l’échéancier et discutent des rôles et responsabilités de chacun. Le client prend en charge la rédaction des contenus. Ça va de soi, puisqu’il est celui qui connaît le mieux son organisation. Il devra aussi planifier une séance photo. Jusque-là, tout va bien.


La refonte prend forme. La firme Web crée des maquettes design qui sont franchement ravissantes. Puisque les contenus sont en cours de création par le client, l’agence habille les maquettes avec de parfaites images trouvées sur des banques de photos en ligne et elle ajoute du texte générique « Lorem Ipsum ». Le client adore. C’est à ce moment qu’il considère réellement amorcer la rédaction de ses textes et de planifier sa séance photo. Il scrute les maquettes et compile les cases de contenus à remplir.

Il ouvre un document Word. 
Vertige.
Le voilà confronté au terrifiant syndrome de la page blanche. 

La date limite est prévue dans deux semaines. Heureusement, les nouvelles photos seront livrées juste à temps. Pour les textes, c’est une autre histoire : l’inspiration ne s’est jamais pointée. Entre-temps, de nouvelles demandes se sont ajoutées : il faut penser aux boutons d’appels à l’action, aux formulaires, messages d’erreur, messages de confirmation, la page 404, etc. 

Trop souvent, on crée des maquettes parsemées de cases vides pour y insérer du texte. Quelle erreur. C’est comme si on tournait un film et qu’on préparait ensuite son scénario.


La pression monte et le client parvient à rédiger quelques sections. Il réalise toutefois qu’il sera impossible de tout livrer à temps. 

La date butoir des contenus est arrivée. La chargée de projet de la firme Web fait l’ultime relance pour obtenir les textes. Le client les envoie. C’est maintenant l’heure d’intégrer les contenus.

Rien ne fonctionne. 
Le client découvre des tonnes d’incohérences dans l’affichage. 
Le designer est découragé des titres trop longs et des sections incomplètes. 
Le développeur Web réalise qu’il devra modifier des fonctionnalités par manque de contenu. 

L’échéancier est dépassé. Le budget est dans le rouge. Tout le monde est fâché. 
La poussière retombe. Chacun met de l’eau dans son vin jusqu’au moment de la mise en ligne qui, au bout du compte, sera satisfaisante pour les deux parties.

… Gageons que cette histoire est bien familière pour plusieurs ayant vécu l’expérience d’une refonte Web. Heureusement, en repensant le processus de rédaction, on peut empêcher l’histoire de se répéter.

Créer des interfaces vivantes

Le langage fait partie intégrante du design

Pour que le langage apporte une réelle valeur ajoutée au design, nous croyons que le/la rédacteur·trice doit prendre part aux premières étapes de conception de l’expérience-utilisateur (UX). En effet, c’est en s’inspirant de vraies conversations prises dans de vrais contextes qu’il est possible de créer des interfaces humaines. Ultimement, c’est ce qui nous permet de guider les client·es dans la rédaction de leurs textes.

Définir le rôle de l’interface

Un bon point de départ aux premières conversations est de s’interroger sur le rôle de l’interface. Est-ce de développer un lien de proximité avec l’utilisateur ? L’éduquer ? L’accompagner dans son exploration ? Le recruter ? La réponse guidera le choix des mots et la structure des éléments de chaque page.

Adopter la logique orale

On distingue deux types de logiques en rédaction : la logique orale et la logique littéraire.

Lorsqu’on écrit dans une application de messagerie, c’est la logique orale : on écrit vite, de façon immédiate, interactive, concrète, et tout se rattache à un contexte ou un événement. C’est vivant, amusant et léger.

La logique littéraire est différente : elle est peaufinée, contemplative, complexe, autoritaire, finie et plutôt abstraite. C’est ce qui est attendu lorsqu’on lit un livre, un rapport ou une étude.

Les technologies sont vivantes : la logique littéraire et le Web sont donc naturellement incompatibles.

Dès qu’on perd le contexte de vue, qu’on se prend trop au sérieux et qu’on espère atteindre un niveau d’excellence, alors on écrit selon une logique littéraire. Le processus est complexe et le résultat est plutôt ennuyant.

Connaître ses atouts

Dans les industries compétitives, on reconnaît l’importance d’identifier ses éléments différenciateurs. En rédaction, ce sont ces éléments qui guideront le choix des titres, des mots-clés SEO, et du contenu de manière plus générale.

Le charisme est aussi un atout à ne pas négliger. Le choix du ton, des images, des couleurs, et de l’apparence générale de l’interface forgent la personnalité d’une plateforme. Elle peut être amusante, à l’avant-garde, austère, intime, robuste, ouverte, intellectuelle, etc. Elle doit refléter votre ADN organisationnel.

Se doter d’un plan de travail

Briser les silos est le premier enjeu à combattre dans tout travail d’innovation. La rédaction doit être le résultat d’un effort de collaboration, et non de torture solitaire. Vous gagnerez à organiser l’agenda de travail de manière à stimuler la collaboration et morceler le travail en petites itérations faciles à réaliser.

La seule manière d’imaginer des interactions est de provoquer des conversations. C’est en rapprochant les expertises en rédaction, design, UX et de développement qu’il est possible de créer des interfaces légères, optimisées pour les moteurs de recherche (SEO), fidèles à la personnalité de l’organisation et un respect des échéanciers et du visuel.

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